Recalé by Michael Hjorth & Hans Rosenfeldt

Auteur:Michael Hjorth & Hans Rosenfeldt [Hjorth, Michael & Rosenfeldt, Hans]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Thriller
ISBN: 9782330132064
Éditeur: Actes Sud
Publié: 2019-11-05T23:00:00+00:00

Weber avait réquisitionné une voiture et conduit en trombe à travers la circulation chaotique de Stockholm. Ça empirait d’année en année, et ce n’était pas seulement les voitures qui étaient plus nombreuses. Certaines rues étaient piétonnisées, d’autres rétrécies pour élargir les pistes cyclables. C’était une décision politique que Weber approuvait en principe, sauf les rares jours où il avait besoin de prendre sa voiture. Un centre-ville sans voitures, d’accord, sauf quand il devait y rouler, et là il jurait comme et contre les autres automobilistes. Il finit par enfreindre la loi et emprunter la file des bus dans Kungsgatan pour gagner du temps. Le portable bon marché qu’on lui avait envoyé était posé sur le siège passager. Il le regardait de temps en temps en se demandant s’il avait bien fait de partir comme ça, sans prévenir personne à la rédaction. C’était quand même d’un tueur en série qu’il s’agissait.

Un homme capable du pire.

Mais pour faire la course en tête, il fallait prendre des risques. Il s’était pourtant promis d’être prudent, de stopper à la moindre sensation de danger. De garder la tête froide, sans se laisser emporter par l’excitation de l’aventure. L’excès d’adrénaline était souvent la cause de mauvaises décisions.

Il inspira à fond, dépassa Stureplan. Il était à présent tout près : il tourna dans Humlegårdsgatan, en direction de la Bibliothèque Royale. Un peu plus loin, dans le parc, il aperçut l’élégant bâtiment, parmi les feuillages printaniers. Il réalisa qu’il n’y était pas venu depuis longtemps. Sûrement plus de cinq ans. Internet avait rendu le travail de recherche plus simple, mais aussi plus ennuyeux. Mais on avait beau faire, impossible de s’opposer à cette évolution. Certes, il lui arrivait de regretter le temps où le journaliste et le journal étaient tout-puissants, où toutes les nouvelles, toutes les informations passaient entre leurs doigts, leurs voix. Mais il y avait dans ce progrès quelque chose d’extrêmement démocratique que Weber appréciait. Que l’information, la communication et les nouvelles ne soient plus contrôlées que par quelques familles était finalement plus conforme à ses convictions politiques. Certes, il y avait beaucoup de choses mauvaises, mais aussi beaucoup de très bonnes. Il voulait croire que cela donnait une image plus vraie de l’humanité et de la vie humaine. Le problème était que beaucoup ne cherchaient que des informations confirmant ce qu’ils pensaient savoir, et se fichaient du reste. Le Net, comme l’existence, était plus complexe que ce que beaucoup auraient voulu.

Il avait beau chercher, il ne repérait pas de stationnement autorisé. La bande jaune le long du trottoir signifiait zone de livraison, mais il y trouva au moins une place où se glisser. Au pire, il paierait l’amende, décida-t-il. Il descendit de voiture. Deux larges allées de gravier menaient à la bibliothèque. De part et d’autre et derrière lui s’étendait Humlegården. Un grand et beau parc très fréquenté en été, cerné par la ville.

Il se mit à marcher. Le portable bon marché à la main. À tout hasard, il consulta à nouveau le SMS, même s’il l’avait lu sûrement dix fois.

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